Les Poot, mes héros de la biodiversité

Les Poot, mes héros de la biodiversité

Pascal et Rachel Poot ne sont pas des cultivateurs comme les autres.  Ils laissent les plantes ‘se démerder’ seules. Ainsi elles développent leurs meilleures propriétés et qualités pour survivre. Et puis, elles transmettent génétiquement à leurs semences et aux futures générations de plantes ‘ la démerde attitude’. Grâce à celle-ci, nous pouvons bénéficier de semences bio aux qualités nutritionnelles et gustatives supérieures à la majorité des légumes produits en France. Quand on m’a parlé des Poot, en mentionnant la culture des tomates sur des bottes de paille, j’ai été de suite époustouflée. Depuis, ils sont rentrés dans ma liste de héros. Je les admire et les considère comme des héros de la biodiversité

Je me suis adressée à eux pour un don de semences, que je partage ensuite aux participant.e.s de mes rituels de don de graines . Je les ai connus le long du chemin que j’ai emprunté pour comprendre les plantes. J’ai connu en 2004 l’existence des OMG.  En 2014, j’ai compris qu’une poignée de graines valait tout l’or du monde et qu’elle possédait le pouvoir de nourrir ou déstabiliser les peuples. En 2015, je me suis mise à collecter des semences paysannes et à apprendre à jardiner. En 2016, j’ai transmis l’enjeu des semences à travers un pamphlet et des performances théâtrales. En 2018, j’ai compris que les plantes étaient dotées d’une conscience et d’une grande intelligence. Aujourd’hui, je suis persuadée qu’elles ont une âme.

Ce qui me fascine chez les plantes, c’est leur envie de vivre et d’aller plus loin qui s’exprime à travers leur capacité d’adaptation. Les plantes ne sont pas des ‘plantes vertes’, inanimées, immobiles et idiotes. Les Poot l’avaient très bien compris aussi, et avaient développé leur sens de l’observation et leur fine intuition, pour les mettre au service des semences.

J’ai poussé mon amour des semences un peu plus loin. Je reconnais quelques aberrations du système agricole qui ne sont pas toujours le fruit du hasard. Je vous en cite certaines :

– J’ai réalisé qu’en créant les OMG, les géants agroalimentaires commettaient un crime contre l’humanité, en pratiquant la manipulation génétique et l’eugénisme sous prétexte de vouloir nourrir la planète. Au plus profond de mon être, je rejetais l’idée que certains se prenaient pour Dieu, car ils avaient analysé et breveté des chaînes d’ADN. Découvrir ne veut pas dire ‘créer’ ou ‘donner vie’… Ces plantes vielles comme le monde existaient bien avant des brevets et leur mercantilisation. Alors quand elles n’apparaissent pas dans le catalogue des espèces et des variétés, les exploitations agricoles, même en bio, deviennent des ‘hors-la-loi’ lorsqu’elles les cultivent et les commercialisent, car elles ne sont pas brevetées. Pascal déplore : « Quand des semences vielles de 10 000 deviennent illégales car elles n’ont pas de brevet, c’est alors scandaleux ! »

– Nature et Progrès, les fondateurs d’agroécologie bio, ne peuvent plus utiliser le label AB ou bio sur l’emballage de leurs produits, alors qu’ils ont créé le concept du bio dans les années 60.

– En bio, on utilise des hybrides f1 alors qu’elles ont été manipulées en labos et dégénèrent d’une culture à une autre. ‘L’hybride F1 est le croisement de 2 lignées pures que les semenciers ont fait dégénérer en labo, par consanguinité poussée au maximum… Chez les semences populations, on applique l’eugénisme, on garde les meilleures, ce sont des idées de nazis…’, déplore Pascal. Selon lui, les tomates hybrides ne donnent jamais plus de 8kg par mètre carré pour les cultivateurs en conventionnel, lui produit 15kgs/m² avec ses semences paysannes.

– La majorité des consommateurs veulent des fruits et légumes calibrés, jolis et sans défauts, et rejettent les fruits et légumes moches, tordus ou difformes alors qu’ils sont plus nutritionnels et gustatifs. Notre responsabilité de consommateurs joue dans l’évolution des plantes. Pascal donne l’exemple  de l’oignon de Stuttgart, qui se conservait autrefois jusqu’à juin, contrairement à février, de nos jours. Avant les oignons de cette variété étaient plats et se conservaient mieux. Mais les cuisiniers des grands restaurants ont demandé à ce qu’ils soient plus ovales, donc plus faciles à peler. Les semenciers n’ont donc sélectionné que les graines des rares oignons ovales afin de les multiplier et de rendre la variété ovale, mais sans capacité de conservation.

Finalement, toutes nos habitudes et nos modes de fonctionnement ont même de l’impact sur la  ‘naturalité de la nature’.  Donc à travers mes ateliers, mes performances et mes rituels de don de semences, j’invite chacun.e d’entre nous à semer et à s’inspirer des Poot. Si vous êtes de celles et ceux qui ont gardé un peu de conscience collective et de sens critique, je vous incite à vous procurer les semences ‘naturellement naturelles’ des Poot. Ce serait une façon de sauvegarder la ‘naturalité de la nature’ et de devenir des héros de la biodiversité, comme les Poot.

atelier semences couple poot

La Belle Plante

Diplômée en jardinage et paysagisme de la célèbre École Du Breuil à Paris, elle s’est aussi formée à la permaculture, à l’agroécologie, et au maraîchage bio en France et en Asie.

Aujourd’hui elle crée des espaces végétaux écologiques et elle fait vivre et comprendre la biodiversité avec humour et poésie.